La vie n’est pas toujours un long fleuve tranquille… Et pour certains, c’est même des montagnes russes particulièrement violentes. Il n’est ainsi pas rare que certains événements de vie viennent fragiliser notre équilibre. Ces événements de vie, qui constituent parfois des traumatismes, nécessitent une réadaptation. Et si nos propres capacités d’adaptation d’adulte peuvent de temps en temps être submergées, c’est évidement le cas aussi pour les plus jeunes !
Ces événements de vie qui peuvent déséquilibrer
Une séparation parentale, un déménagement, le burn-out d’un parent, la maladie d’un proche, l’arrivée d’un nouveau membre dans la famille, la perte d’un proche, un changement d’école… Beaucoup d’événements ordinaire qui peuvent déstabiliser un jeune. Et il arrive par ailleurs, la loi des séries obligeant, qu’on puisse cumuler en un court temps ces facteurs de stress !
Ces événements peuvent être parfois plus nettement traumatiques et bien moins ordinaires. Je reçois régulièrement des jeunes ayant vécu un ou des épisodes de violence physique ou psychique. Il peut être question de maltraitances corporelles ou psychologiques, d’abus sexuels, de harcèlements, d’agressions diverses…
Notons aussi que le traumatisme peut impacter même sans être soi-même victime ou témoin. Il n’est effectivement pas rare que certains jeunes consultent pour des traumas dont ils ne sont pas directement victime. Le malheur a bien souvent touché très violemment quelqu’un de très proche dans ces cas.
Une vulnérabilité face aux facteurs de stress quotidien
Certains événements de vie potentiellement douloureux sont plutôt normaux, ordinaires, classiques, banals… Il peut s’agir d’un déménagement, d’une séparation parentale, d’une recomposition familiale… Dans ces situations, une stress réactionnel apparaît, avec son lot de conséquences et de manifestations propres à chacun.
Le retentissement chez les enfants
Le petit enfant peut parfois un peu régresser ou sembler insécurisé, plus particulièrement au moment du coucher ou des séparations. Il pleure plus facilement. Pour les enfants de primaire, cela se manifeste plus volontiers par des questionnements anxieux et l’apparition d’une humeur à fleur de peau. Il peut également y avoir pendant un temps des troubles somatique. Les parents notent par exemple un manque de sommeil, d’appétit et de concentration.
Ce qui s’observe généralement chez les adolescents et les adultes
Les ados et les jeunes adultes tentent la plupart du temps de gérer cette phase par eux-même, de façon parfois peu visible pour les proches pur ne pas les inquiéter. Cela impacte toutefois régulièrement leur sommeil, leur hygiène de vie ou plaisir dans les activités. La crise d’adolescence peut apparaître majorée, avec plus d’opposition ou de testing des limites. Bref, il est souvent plus difficile de savoir à quel point ils ont pu être impactés.
Une vulnérabilité très différente suivant les individus
Pas besoin évidement de consulter systématiquement un psychologue dès lors que les événements en question ne sont pas clairement traumatiques et que cette phase ne dure pas dans le temps ou ne présente pas une intensité particulièrement importante. Effectivement, ces déséquilibres mobilisent les défenses psychiques qui alors évoluent. La mise à jour réalisée, on en sort généralement grandi.
Toutefois, on pense que nous naissons tous avec une vulnérabilité innée qui peut se trouver nettement majorée suivant notre histoire de vie. Un exemple simple qui permet de comprendre cela est l’obésité : nous naissons tous avec une vulnérabilité différente face à l’obésité, suivant notre métabolisme. Le stress, le manque d’activité, l’alimentation sont des éléments susceptibles d’amplifier le développement d’une forte prise de poids. Mais à hygiène de vie équivalente, tout le monde ne prend pas de la même façon… Il en va de même en ce qui concerne les troubles psychiatriques et cognitifs au regard de l’histoire de vie et de notre vulnérabilité.
Ainsi, certains jeunes ne sont pas seulement déséquilibrés – ils voient parfois leurs capacités d’adaptation être complètement submergées et risque un effondrement ou un décompensation à court terme. Un coup de pouce est alors nécessaire. Si vous vous demandez si cette phase réactionnelle relève ou non d’un soutien, n’hésitez pas à contacter un psychologue ou un psychiatre.
Les conséquences d’un choc traumatique à court et long terme
Le court et moyen terme
La dissociation traumatique
Lors d’un choc traumatique intense, une dissociation péritraumatique peut apparaître, prenant la forme d’un état de sidération, d’un bug complet.
L’imagerie cérébrale a permis de mieux appréhender le mécanisme alors à l’oeuvre. L’effroi est alors tel qu’il hyper-stimule les amygdales, ces petites amandes dans notre cerveau particulièrement impliquées dans le traitement de la peur. Le système d’alarme amygdalien augmente notamment, lorsqu’il se met en marche, la production d’adrénaline ce qui a pour but de faciliter l’action. En cas de surchauffe de nos amygdales, on assiste à une sur-alimentation du corps, avec ainsi des risques cardio-vasculaires ou de surchauffe cérébrale. Devant ce risque, le corps préfère mettre en place un système d’extinction des feux en court-circuitant l’amygdale afin de protéger le cœur et le cerveau. Cette déconnexion entraîne alors en quelque sorte une déconnexion des zones cérébrales nous permettant de penser la situation. Cela donne souvent l’impression d’être dans un film, déconnecté de la situation, figé…
Cette déconnexion de l’amygdale va aussi fragilisé la communication avec la zone hyppocampique, impliqué dans la mémoire. Le souvenir traumatique va parfois rester comme bloqué dans l’amygdale. Le souvenir dans l’amygdale va alors resté chargé de l’émotion initiale sans pouvoir être tout à fait traité intellectuellement. On comprends alors que la dissociation péritraumatique est corrélée à un risque de troubles psycho-traumatiques à long terme.
Le stress aigu
On parle également de détresse péritraumatique ou d’état de stress aigu pour qualifier la réaction anxieuse sans confusion notable devant un trauma. L’intensité de cette phase est également corrélée aux risques de perturbations à long terme.
Le sentiment de colère et de culpabilité
Peu après cette phase, on voit régulièrement apparaître un sentiment de colère tout à fait compréhensible. Toutefois, certaines personnes semblent retourner ce sentiment de colère contre-elle même et développement un sentiment de culpabilité. Ce sentiment, qui peut limiter la dénonciation du trauma subi, permettrait de limiter l’intensité du stress – la victime se sentant coupable se donnant du même coup l’illusion d’avoir, au moins en partie, été en contrôle des événements et pouvant limiter le risque d’un nouveau trauma. Outre le retard ou l’absence de plainte que ce fonctionnement induit, on sait maintenant que cette culpabilité peut être durable et dès lors très péjorative pour se défaire du traumatisme.
A long terme
La liste des conséquences potentielles d’un traumatisme est longue. Des états dépressifs sont très fréquents et souvent associés à des troubles anxieux et des troubles somatoformes. La dissociation péritraumatique peut se systématiser avec des troubles dissociatifs figurant un mode de défense dysfonctionnel mais limitant les reviviscences traumatiques.
On parle également de syndrome de stress post-traumatique qui associe des changements d’humeur à type de dépression ou troubles anxieux à la réactivation des souvenirs survenant régulièrement, parfois uniquement sous forme de cauchemars, et où le sujet tente d’éviter les situations lui rappelant de près ou de loin le trauma. Il n’est pas rare d’avoir alors des problèmes d’attention et de mémoire. Voici un lien vers un questionnaire sur la probabilité de présenter un stress post traumatique.
Dans ces cas, il est important de consulter.
L’adversité précoce et les traumatismes répétés
On parle d’adversité précoce chez les personnes qui ont traversé des situations malheureuses de façon répétées ou continues dans l’enfance. Les maltraitances, les carences de soin ou des abus ont été très étudiés pour mieux appréhender l’impact de cette adversité à l’âge adulte. Mais on peut évoquer aussi une adversité d’intensité moindre dans des situations très diverses. Chez un enfant avec des parents en conflit. Ou un frère autiste avec trouble du comportement. Voir ayant un proche très malade…
Outre le malaise psychologique induit, ces stress ou traumatismes chroniques augmentent évidemment très significativement les risques de perturbations, mais pas seulement au niveau psychique. Les études montrent effectivement, outre une vulnérabilité face aux maladies psychiatriques, une fragilisation de la santé physique ainsi qu’un risque de développement de troubles cognitifs. En bref, l’adversité précoce augmente le risque de maladies générales, de troubles émotionnel, comportementaux et de dys-. Ainsi, le risque de TDAh est majoré chez les enfants avec une histoire de vie lourde… mais évidemment le TDAh n’est pas uniquement et toujours expliqué par une adversité précoce.
Le travail psycho-thérapeutique est dans ces situations pertinent pour limiter le stress chronique fragilisant alors le développement à court et long terme. Le travail thérapeutique débute cependant bien souvent seulement à l’âge adulte, parfois bien longtemps après les événements.
Le choix d’un thérapeute : transfert et techniques de soins
Les techniques qui peuvent être envisagées dans ces situations sont nombreuses. Les psychothérapies dynamiques, les thérapies cognitivo-comportementales, l’EMDR, les thérapies narratives, la ludothérapie pour les plus jeunes, les groupes de paroles… sont autant de stratégies qui ont montré des effets bénéfiques en moyenne lors de traumatismes. Et ces techniques peuvent se mixer. Les psychologues s’orientent de plus en plus vers une approche intégrative et en utilisent généralement plusieurs.
Le plus simple est de discuter directement des principes des différentes approches avec le thérapeute ou votre médecin.
Et outre la technique, c’est sans doute la notion de transfert qui est, comme souvent d’ailleurs, l’élément central du dynamisme de la thérapie. Le transfert en psychologie relève de ce qui est projeté sur le psy au regard de l’histoire du patient. Dès lors, une jeune fille ayant subi des abus sexuels commis par son grand-père aura peut-être du mal à être à l’aise avec un thérapeute masculin ayant plus ou moins l’âge de son grand-père… Cet exemple caricatural ne permet pas d’appréhender toutes les subtilités des mouvements de transfert qui posent la base du travail thérapeutique. Néanmoins, il permet d’en saisir les grandes lignes et explique la présence de ma photo sur le site !
Avant de parler pour se soigner, il faut oser en parler et éventuellement porter plainte
Beaucoup de personnes subissant des traumatismes répétés, alors bien souvent dans la sphère familiale, n’osent pas parler. C’est pourtant le premier pas tout ce qui relève d’actes réprimés par la loi. Les abus sexuels, la violence physique ou psychologique, le manque de soin : c’est interdit par la loi.
Que tu sois directement concerné ou qu’il s’agisse d’un ami qui t’a fait des confidences, parles-en à quelqu’un pour que ça s’arrête. Un prof, un médecin, un proche… Appelle la police au 17. Fonce aux urgences de suite si tu as des preuves. Bref, parles-en et vite !